Alors que le Gabon commémore les 21 ans du crash de l’avion Gabon Express, les familles des victimes n’ont toujours pas obtenu justice. L’indifférence des autorités et le silence des tribunaux.
Il y a vingt et un ans, le 8 juin 2004, un avion de la compagnie privée Gabon Express s’écrasait en mer, à une centaine de mètres seulement d’une plage au nord de Libreville. L’appareil, qui assurait une liaison domestique entre Libreville et Franceville, venait à peine de décoller de l’aéroport international de la capitale. À son bord : 30 personnes. Le bilan fut tragique : 19 morts et 11 rescapés.
Le choc fut immense. La douleur, abyssale. Et aujourd’hui encore, elle reste vive pour les Gabonais. L’an dernier, lors d’un rassemblement du collectif des proches des victimes, le ton était empreint de désespoir, mais aussi de dignité. « Vingt ans après, c’est difficile à supporter et à comprendre », soupiraient-ils.
« Vingt ans après, nous n’avons pas encore fait notre deuil. Nous demandons que les plus hautes autorités comprennent notre douleur, notre souffrance », confiait Maxime Obiang Nze, président du Collectif, le 8 juin 2024. Chantal Otounga, la secrétaire générale, exprimait son incompréhension : « Nous ne comprenons pas que 20 ans après ce dossier n’ait pas connu une issue judiciaire. Pourquoi ça bloque ?… »
Un silence judiciaire complice ?
Mais pourquoi, après plus de deux décennies, aucune lumière n’a été faite sur ce drame ? Pourquoi la justice gabonaise, censée être garante des droits, de la vérité et de la réparation, piétine-t-elle à ce point ?
Selon le droit gabonais, les victimes et leurs familles ont droit à une justice équitable, diligente et transparente. En réalité, ce crash emblématique est devenu le symbole d’une justice à deux vitesses, où les drames du peuple peuvent être ignorés sans conséquence.
Car jusqu’à ce jour, aucune enquête judiciaire n’a abouti, aucun procès n’a eu lieu, aucune responsabilité n’a été reconnue. L’appareil était-il assuré ? Son état mécanique était-il conforme aux standards de sécurité ? Comment a-t-il pu subir une telle avarie si rapidement après le décollage?
Autant de questions brûlantes qui, en 21 ans, n’ont reçu aucune réponse officielle.
Lueur d’espoir sous le régime de la Transition ?
Pour l’association des parents des victimes, il est urgent que ce dossier soit enfin traité avec la rigueur qu’il mérite. Le collectif, usé mais debout, veut croire qu’un tournant est possible.
Le président Brice Clotaire Oligui Nguema, depuis la Transition jusqu’aujourd’hui, a affiché une volonté de rupture avec les injustices passées et l’établissement d’un État de droit effectif. Ce 8 juin 2025, les regards des familles et des citoyens se tournent vers lui.
Saisira-t-il l’opportunité d’inscrire la justice dans l’Histoire en rouvrant le dossier Gabon Express ? Mettra-t-il fin à 21 années de silence, 21 années d’attente et de souffrance ? Le doute n’est pas permis. Le Gabon ne pourra guérir qu’à la condition de regarder ses plaies en face. Et ce crash, oublié de l’État mais pas des cœurs, attend toujours vérité, justice et mémoire.