Ce mercredi 11 juin, au cours d’une conférence au siège de l’Agence gabonaise de Sécurité Alimentaire, le directeur général Jean Delors Biyogué Bi Ntougou a dressé un diagnostic sans détour sur la situation critique de cette administration. Au cœur de son intervention : un appel pressant pour un financement public de plus de 3 milliards de francs CFA sur trois ans, afin de permettre à l’agence de remplir pleinement sa mission de protection des consommateurs gabonais.
« Nous avons besoin de la modique somme de 3 milliards 352 millions 800 mille francs CFA, pour développer l’agence », a déclaré Jean Delors Biyogué Bi Ntougou. Ce montant se répartirait comme suit : 1,401 milliard pour l’année 2025, 615 millions pour 2026, 398 millions en 2027, auxquels s’ajoute une dette actuelle estimée à 938 millions de francs CFA. Selon le DG, cette enveloppe budgétaire est indispensable pour remettre à niveau une agence en souffrance.
Une urgence sanitaire nationale
Jean Delors Biyogué Bi Ntougou a souligné que « l’agence ne bénéficie pas d’une ligne budgétaire au niveau de la loi de finances, elle est complètement dépendante de ses propres actions ». Cet appel est jugé par la direction comme « une urgence absolue » pour doter l’AGASA de ressources humaines, matérielles et logistiques adéquates. Sans cette aide de l’État, l’agence ne pourra ni moderniser ses infrastructures, ni recruter et former ses agents, ni mener à bien les contrôles sanitaires indispensables à la sécurité des aliments consommés au Gabon.
Aujourd’hui, les inspections aux frontières, dans les marchés, commerces et grandes surfaces ne sont ni régulières ni systématiques, faute de moyens. Cette situation expose les populations à un risque constant d’intoxications alimentaires et de maladies d’origine alimentaire, notamment en raison de produits importés non contrôlés. « Notre agence manque cruellement de moyens pour mener à bien ses missions », a insisté Jean Delors Biyogué Bi Ntougou.
Une agence sous-équipée et dépassée
Les chiffres dévoilés par le directeur général parlent d’eux-mêmes : seulement cinq véhicules pour couvrir 267 667 km², 195 agents pour plus de 2 millions d’habitants, aucun laboratoire mobile ni kits d’inspection modernes aux frontières. L’AGASA opère encore avec des méthodes obsolètes, dans un contexte où les menaces sur la sécurité sanitaire des aliments sont croissantes.
Les missions en province sont souvent limitées à une fréquence trimestrielle, par manque de budget. Les agents sont parfois contraints de travailler dans des conditions précaires, sans équipements de protection adéquats. Cette situation nuit non seulement à leur efficacité, mais aussi à leur santé.
Une ambition à la hauteur des enjeux
Malgré ces difficultés structurelles, l’AGASA ne manque pas d’ambition. Le plan stratégique prévoit la certification de l’agence, l’accréditation du laboratoire national et l’inscription du Gabon dans les classements internationaux en matière de sécurité alimentaire, notamment dans les rapports du Global Food Security Index.
Cette dynamique s’inscrit pleinement dans le projet de société du président de la République, qui fait de la sécurité alimentaire un pilier central de l’autosuffisance nationale et du développement durable. « Même si nous sommes en dernière position la première année, nous devons exister sur la scène internationale », a souligné le DG.
Un appel clair à l’État
Jean Delors Biyogué Bi Ntougou a conclu avec un message fort à l’intention des pouvoirs publics, notamment le ministère de l’Agriculture : « Nous ne demandons pas un cadeau, mais une juste reconnaissance de l’importance de la sécurité alimentaire pour le Gabon. Un investissement de plus de 3 milliards sur trois ans est indispensable pour sauver l’AGASA et protéger les populations », a-t-il déclaré.
Cet appel intervient dans un contexte symbolique : quelques jours seulement après la Journée internationale de la sécurité sanitaire des aliments, célébrée le 7 juin. Un rappel de l’urgence d’agir, dans un pays où la transformation du système alimentaire est désormais un impératif de santé publique et de souveraineté. Dans les prochains jours, la direction de l’AGASA espère rencontrer les membres de l’Assemblée nationale.