La saison sèche est arrivée, avec son lot de cérémonies ensoleillées, de festivités familiales et de mariages coutumiers à la gabonaise. Mais derrière le faste de ces événements, un malaise persiste : la question de la dot.
En Afrique, mariage traditionnel rime avec dot. Le 21 décembre 2024, l’Assemblée nationale gabonaise a adopté une loi encadrant le mariage coutumier et fixant la dot à 1,5 million FCFA. Une somme importante dans un pays confronté à la vie chère et à un chômage élevé. Pourtant, la mesure officielle ne suffit pas à alléger les exigences familiales. Car, en plus de ce montant, des listes constitutives de la dot demeurent toujours plus longues et imposées : congélateurs, lits, cartons de poisson salé, électroménagers, tissus… Cette inflation matérielle transforme ce rite ancestral en une charge commerciale.
On peut alors se demander : quel est le sens d’un congélateur dans un mariage coutumier ? Dans les années 60, la dot se composait d’éléments simples mais symboliques : une enclume, des noix de cola, du sel. Des biens qui reflétaient des valeurs fondamentales : respect, travail, alliance entre familles.
Mais aujourd’hui, ces objets ont été remplacés par des exigences marchandes, souvent dénuées de toute signification culturelle.
Le sociologue camerounais Fred Eboko résume cette dérive dans un entretien accordé à Jeune Afrique : « La dot parle autant de richesse que de pauvreté et de paupérisation aujourd’hui. Le mariage est devenu l’occasion d’exhiber ce qui manque le plus au commun des Africains : l’argent. L’épouse, pour laquelle tout ce théâtre est conçu, n’est qu’un prétexte. »
Dans ce contexte, de nombreux jeunes renoncent au mariage. Faute de moyens pour satisfaire aux exigences coutumières, ils s’installent dans le concubinage, une union de fait sans reconnaissance légale.
La conséquence immédiate d’une dot trop élevée est la fragilisation ainsi que la stabilité juridique et culturelle des couples. Teeld Bascheidzé témoigne : « Il y a des hommes qui, à cause du montant exigé par la belle-famille et des listes exhaustives, renoncent au mariage.»
À l’inverse, certains pays ont choisi de réhabiliter la symbolique de la dot. Au Bénin, une réglementation, entrée en vigueur en mai 2025, plafonne la dot à 300 000 FCFA pour les jeunes filles et 80 000 FCFA pour les femmes remariées.
Finis les cadeaux luxueux, les banquets ostentatoires et les listes interminables. Objectif : alléger les charges, préserver la dignité et remettre le sens au cœur de l’union.
Peut-être que le Gabon gagnerait à s’inspirer de ces approches modestes. Repenser la dot, non comme une transaction commerciale, mais comme un acte de respect entre familles, pourrait favoriser l’accès au mariage, valoriser la femme et renouer avec les fondements culturels originels.
Aujourd’hui, se marier au Gabon n’est plus une question de volonté, mais de… capacité financière.