Le 17 juin dernier, un enfant de 14 ans a succombé sous les coups d’un voisin alors qu’il jouait avec ses camarades dans un immeuble de la commune de Yopougon. Derrière ce fait divers se cache une réalité plus profonde : celle du manque cruel d’infrastructures de loisirs pour les enfants dans les quartiers urbains des pays africains en développement.
Le mardi 17 juin 2025 à Yopougon, une commune d’Abidjan, capitale économique de Côte d’Ivoire, un simple moment de jeu entre enfants s’est transformé en scène d’horreur. Un groupe de garçons, âgés de 10 à 14 ans, jouait comme à son habitude dans la cour et les couloirs d’un immeuble de ce quartier populaire. C’est alors qu’un voisin, manifestement excédé par leur présence, s’est violemment lancé à leur poursuite, armé d’une matraque. Il aurait rattrapé l’un d’eux âgé de 14 ans.
Selon webmedias, les témoignages recueillis sur place font état d’un passage à tabac d’une extrême brutalité. L’agresseur présumé aurait même utilisé sa matraque pour torturer le garçon, jusqu’à ce que mort s’ensuive.
L’espace public, terrain miné pour les enfants
Ce drame révèle une réalité criante : dans de nombreux quartiers populaires des villes africaines, les enfants n’ont tout simplement nulle part où jouer. Les écoles ferment tôt, les centres de loisirs sont rares, coûteux ou inexistants et les parcs publics, quand ils existent, sont mal entretenus, insalubres ou occupés à d’autres fins. Résultat : les enfants se divertissent là où ils peuvent, soit dans les escaliers, les couloirs, les cours d’immeubles ou dans les rues. Mais ces espaces ne sont ni sûrs ni pensés pour eux. Pire, ils y sont parfois perçus comme indésirables. Dans ces conditions, la cohabitation entre générations tourne parfois au conflit, voire à la violence.
Une enfance urbaine sous tension
Ce cas de Yopougon n’est malheureusement pas un cas isolé. Dans de nombreux pays africains, les enfants des zones urbaines subissent les effets d’une urbanisation rapide, désorganisée et peu inclusive. Peu d’espaces leur sont réellement dédiés et encore moins sécurisés. Ils évoluent dans un environnement où ils sont à la fois visibles et invisibles : omniprésents dans l’espace public, mais rarement pris en compte dans les politiques d’aménagement.
Ce vide structurel expose les enfants à de multiples dangers : violences physiques, accidents de la circulation, harcèlement, isolement. Et dans le cas de Yopougon, c’est un adulte, censé garantir leur sécurité, qui a finalement commis l’irréparable.
Urgence d’une politique de l’enfance adaptée
L’agresseur présumé a été interpellé. Mais au-delà de la sanction individuelle, ce drame interpelle. Il rappelle l’absence criante de dispositifs pensés à la portée des enfants, que ce soit dans les villes, dans les écoles, ou dans les politiques publiques.
Dans les quartiers défavorisés, où la densité de population augmente plus vite que les infrastructures, la jeunesse devient invisible dans les plans d’aménagement urbain. Pourtant, repenser la ville, pour et avec les enfants, est un enjeu fondamental. Il ne s’agit pas seulement de construire des aires de jeux, mais de reconnaître le droit de chaque enfant à un espace sécurisé, adapté à son développement.
Un appel à la responsabilité collective
Les Mairies, les urbanistes, les éducateurs, les associations… ont tous un rôle à jouer. La création de zones de loisirs accessibles, la sensibilisation des adultes à la cohabitation intergénérationnelle et le renforcement des politiques de protection de l’enfance doivent devenir des priorités. Car derrière chaque jeu improvisé dans une cour d’immeuble, il y a un besoin fondamental : celui de grandir en sécurité, de respirer et de vivre son enfance pleinement. Ce droit ne devrait pas être un luxe réservé à une minorité, mais une évidence pour tous.