Dans une interview accordée à la rédaction de Gabonclic.info, le 7 décembre 2024, l’homme politique et ancien pensionnaire de la prison centrale de Libreville revient sur son arrestation, sa détention au pénitencier communément appelée « Sans-Famille », sa libération après le coup d’État mené par le général Brice Clotaire Oligui Nguema, ainsi que son avenir en politique. Lecture.
Gabonclic.info : En 2023, quelques temps après avoir déclaré votre candidature à la magistrature suprême, vous avez été interpellé et conduit à la prison centrale de Libreville. Pouvez-vous revenir sur cette période de votre vie ?
Sosthène Orphée Lendjedi Ibola : Avant tout, je tiens à remercier votre rédaction pour cette opportunité et pour le soutien manifesté durant cette épreuve difficile. Pour répondre à votre question, permettez-moi de me présenter brièvement : je suis Sosthène Orphée Lendjedi Ibola, originaire de Lekindou, Bawoumbou, de père et de mère Nzebi, tous deux de la province de la Ngounié. Marié, père de quatre enfants, je suis également président d’un mouvement politique, ex-prisonnier politique et ancien candidat déclaré à la présidentielle de 2023.
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Concernant mon arrestation, elle peut se résumer en deux étapes. D’abord, après l’élection de 2016, j’ai quitté le Gabon pour des raisons politiques. J’étais au Canada. Mais avant cela, j’avais déjà été convoqué plusieurs fois par les services militaires. Lors de mes interrogatoires, mes voyages en Israël étaient au cœur des préoccupations, ils voulaient savoir pourquoi j’y étais. J’ai expliqué que c’était pour nouer des partenariats dans le cadre de projets agricoles. Ensuite, ma candidature à la présidentielle de 2023 a été l’élément déclencheur. Dans notre pays, tout candidat hors de la mouvance présidentielle, est vu comme un ennemi du pouvoir. Mon engagement dans l’opposition radicale, mon désir de changement, et mon ambition de bâtir un Gabon nouveau ont conduit à mon arrestation.
Quelles sont les accusations qui ont été retenues contre vous ?
Les charges retenues contre moi étaient absurdes : « Outrage au chef de l’État. Appel à la révolte contre l’autorité de l’Etat. Instigation à la destruction et à la dégradation de biens publics et association de malfaiteurs ». Tout cela n’était qu’une farce pour m’écarter de l’élection présidentielle. À titre d’exemple, on m’a même accusé d’avoir incendié le stade d’Oyem, alors que j’étais hors du pays depuis six ans.
Comment avez-vous vécu votre incarcération ?
Mon séjour à la prison centrale fut une expérience traumatisante. Dès mon arrestation, les procédures judiciaires n’ont pas été respectées. J’ai été violemment appréhendé, privé de mes droits fondamentaux et conduit à l’annexe de la prison dans des conditions déplorables. Je garde un souvenir amer de cette période. J’ai failli perdre la vie à cause des mauvais traitements, mais un codétenu m’a secouru lorsque j’étais au plus mal.
Quel a été votre sentiment lors de votre libération ?
Ma libération, intervenue après le coup d’État, fut pour moi une véritable résurrection. Nous avions perdu tout espoir de revoir un jour la liberté sous l’ancien régime. Ce coup d’État a été une délivrance et une source de joie immense pour nous.
Quel est votre avenir politique ?
Je suis actuellement en phase de reconstruction personnelle et familiale après cette épreuve. Cependant, je travaille à la création d’une structure politique pour participer aux prochaines échéances électorales, notamment les législatives. Je reste vigilant mais constructif vis-à-vis de la Transition. Je ne ferai pas de critiques gratuites. Nous observerons les actions du Comité pour la transition et la restauration des institutions (CTRI) et du président Brice Clotaire Oligui Nguema. L’heure viendra de dresser le bilan. Pour l’instant, laissons le Président de la Transition travailler. Je vous remercie.