Une simple affaire d’attribution de places dans un marché flambant neuf de Lambaréné a déclenché une crise verbale enflammée et pourrait virer à un incident diplomatique entre Libreville et Cotonou.
Tout est parti, il y a quelques jours, de vidéos circulant sur les réseaux sociaux. Dans l’une, l’activiste gabonais Éric Otsetse s’exprime vivement. Dans l’autre, plus virale encore, une figure bien connue sous le nom de Tata Bertille fulmine : les places du nouveau marché de Lambaréné auraient été attribuées en majorité à des commerçantes béninoises. L’altercation musclée avec le délégué spécial de la ville frôle la bagarre.
La tension monte d’un cran lorsque la Direction générale des recherches (DGR) interpelle les activistes pour de longues heures d’audition, avant de les relâcher. Sur la toile, la réplique est immédiate : des internautes béninois déversent un flot d’injures, qualifiant les Gabonais de « paresseux », « fainéants », « bons à rien ». L’incendie s’embrase avec un audio encore plus virulent, où une femme béninoise promet rien de moins que « l’invasion du Gabon par les Béninois pour en prendre le contrôle total ».
Bien que ces propos relèvent de la colère, ils provoquent un choc, menaçant le fragile vivre-ensemble. Or, au Gabon, la communauté béninoise est nombreuse, tandis qu’au Bénin, des dizaines de jeunes Gabonais poursuivent leurs études. Depuis, les réseaux sociaux bruissent d’échanges tendus, attisant la méfiance entre les deux peuples.
Face à cette situation, le 14 août 2025, le ministère béninois des Affaires étrangères publie un communiqué officiel. Cotonou dit avoir pris connaissance « de menaces et actes d’intimidation visant la communauté béninoise au Gabon » après l’attribution des places de marché. Le ministère « réaffirme sa détermination à veiller à la sécurité et au respect des droits des ressortissants béninois » et invite la diaspora à « la sérénité et à la retenue », tout en rappelant « l’obligation de respecter scrupuleusement les lois et règlements » des pays d’accueil.

Ce communiqué publié sur une plate-forme de communication officielle du ministère beninois des Affaires Étrangères révèle l’ampleur du malaise.
Le texte annonce également, « en coordination avec les Autorités gabonaises », l’envoi prochain d’une mission d’identification et de recensement des Béninois volontaires pour un retour au pays. Enfin, le Bénin réaffirme son attachement à la solidarité africaine et à l’idéal panafricaniste.
À ce jour, les autorités gabonaises n’ont toujours pas réagi publiquement. Un silence pesant, alors que la crise, née d’un marché local, risque de fragiliser davantage les liens historiques entre Libreville et Cotonou.
