Le réseau qui vient d’être démantelé par la Direction générale des services spéciaux, met en lumière les manquements inquiétants du système carcéral gabonais et la complicité de certains agents pénitentiaires.
Des prisonniers qui organisent des trafics depuis leurs cellules, des téléphones qui circulent moyennant argent et des documents administratifs falsifiés depuis la prison centrale de Libreville, tels sont les méfaits mis en lumière par les agents la direction générale des services spéciaux. « En partant au tribunal, j’ai laissé des consignes à M. Mathias et M. Amine de gérer certaines choses pendant mon absence. En prison, il y a certains quartiers où il y a des téléphones, avec lesquels on communique moyennant quelque chose », a reconnu le principal suspect chez nos confrères de Gabon 1ère. Une déclaration qui interroge profondément sur le rôle et la responsabilité des matons censés assurer la discipline et la sécurité dans les centres de détention.
Comment expliquer qu’un détenu parvienne à passer des coups de fil, transmettre des ordres, et même organiser un trafic de faux documents, parfois d’une grande sensibilité comme des certificats de nationalité ou des passeports ? Il est évident que de telles pratiques ne sont possibles qu’avec la complicité tacite ou active de certains agents pénitentiaires, qui ferment les yeux – ou tendent la main – contre rémunération. Une réalité qui va à l’encontre de la volonté affichée des autorités publiques de restaurer l’autorité de l’État et les valeurs de la République.

Plus inquiétant encore, ces dérives révèlent que la prison n’est plus un lieu de réinsertion ou de sanction, mais un espace poreux où les réseaux criminels peuvent prospérer à l’abri des regards. Dans ce contexte, les agents qui permettent l’introduction et l’utilisation de téléphones en détention sont tout aussi coupables que les détenus eux-mêmes. En encourageant indirectement la récidive, ils trahissent la mission qui leur est confiée et mettent en péril les efforts de réforme.
Il est temps d’ouvrir un véritable débat national sur les conditions de détention et le fonctionnement des prisons au Gabon. Car restaurer les institutions, ce n’est pas seulement nommer de nouveaux dirigeants, c’est aussi refonder l’éthique professionnelle à tous les niveaux, y compris dans les cellules les plus obscures du système pénitentiaire.
