Depuis quelques semaines, une vague d’épuration numérique secoue le paysage politique gabonais sur les réseaux sociaux. Cette offensive ciblée contre les voix critiques a mené, après la suppression remarquée des pages de plusieurs activistes farouchement opposés au pouvoir, à la disparition soudaine du compte Facebook d’Alain-Claude Bilie-By-Nze, ancien Premier ministre et actuel président du parti d’opposition Ensemble Pour le Gabon (EPG).
Pour l’EPG, ce n’est pas un simple « bug » technique, mais bien un acte ciblé qui s’inscrit dans une série d’attaques contre les voix dissidentes. Le parti crie à la censure et y voit une « atteinte grave à la liberté d’expression de l’opposition ».
Un analyste de la vie publique, souhaitant garder l’anonymat, rappelle que ces événements ne sont peut-être pas le fruit du hasard, évoquant des menaces passées. « Il y a un moment, un ancien activiste en poste de responsabilité au niveau de l’Arcep promettait de s’occuper des comptes des activistes sur les réseaux sociaux. Il l’a exprimé de façon claire sans crainte lors des directs… J’ai trouvé cette sortie maladroite », rappelle-t-il.
Cette même source conclut en pointant du doigt l’incohérence entre ces actes et le discours officiel. « Il affirmait que le jour où il aura plus de responsabilités et les autorisations nécessaires, beaucoup allaient disparaître des réseaux sociaux. Nous trouvons cela regrettable de la part des personnes qui accompagnent le chef de l’État qui pourtant s’est toujours dit très attaché à la liberté d’expression ».
« Une dérive autoritaire »
L’incident a suscité la « consternation » immédiate au sein de l’EPG. Le timing de l’acte est jugé particulièrement suspect, d’autant que la page ciblée est celle du candidat arrivé deuxième à la dernière élection présidentielle.
Dans un communiqué officiel signé par le Secrétaire général, Eric-Joël Bekale, le parti interpelle solennellement la communauté nationale et internationale sur ce qu’il perçoit comme une dérive autoritaire de la Transition. L’EPG affirme sans détour que la suppression du compte d’un opposant politique « ne saurait être perçu comme un acte anodin ». Ce geste, selon le parti, « matérialise une volonté de réduire au silence ceux qui refusent l’alignement imposé ».
Le parti d’Alain-Claude Bilie-By-Nze s’est engagé à poursuivre son action politique « par tous les moyens que garantit la République », réaffirmant sa détermination à défendre la transparence et la confrontation d’idées.
L’appel à la résistance
Poursuivant sa critique acerbe des autorités, l’EPG n’hésite pas à monter le ton, affirmant que cet « acte, d’une bassesse inqualifiable, n’empêchera pas la vérité de surgir : celle d’un régime dont l’hypocrisie prolonge, en pire, les travers du passé ». Face à cette attaque numérique, l’EPG « appelle les forces vives à résister à toute dérive dictatoriale et à toute tentative d’éteindre les voix dissidentes ».
Comme solution pour une véritable réconciliation nationale face à ces tensions, le parti de Bilie-By-Nze réitère son appel pour la mise en place de la « commission vérité, justice, réparation et réconciliation ». L’enjeu de la liberté d’expression, déjà fragile, est désormais clairement posé sur la place publique.



