Dans son 1er discours à la nation, le 16 août 2025, le premier président « élu » de la Ve République gabonaise, Brice Clotaire Oligui Nguema, a indiqué sa méthode et fixé ses objectifs pour les prochaines années. Désormais président et chef du Gouvernement, C’BON a qualifié le 17 août de « jour sacré…symbole de notre souveraineté, de notre unité et de notre destin commun. »
Au cas où certains l’auraient oublié, ou en auraient douté, le président de la République re-fixe la hiérarchie des évènements. C’est-à-dire que le 17 août est, et demeurera, l’évènement-phare fondateur de notre Nation devant tous les autres, tout aussi importants…
Sur le plan politique, Brice Clotaire Oligui Nguema dit vouloir « œuvrer collectivement à la construction d’une démocratie gabonaise » et promet qu’à la suite de la présidentielle du 12 avril 2025, « …les élections législatives et locales à venir seront libres », elles aussi.
Décidé à surprendre l’élite politique et administrative habituée à d’autres pratiques, il assure que « …la géopolitique n’a pas porté ses fruits… » et qu’elle est désormais à bannir, au profit de « la compétence ».
L’idée qu’on peut bâtir ensemble
Autant de points qui nous interpellent. Existe-t-il une démocratie à la gabonaise qui se distinguerait de la démocratie moderne que nous connaissons ? Si oui, quelles seraient alors ses spécificités ? A vrai dire, le président ouvre la porte à l’idée qu’on peut bâtir, ensemble, un dialogue permanent entre ceux qui se considèrent comme des opposants et dont la mission est de s’opposer et de proposer des solutions alternatives, à ceux qui dirigent. Il suggère que ce dialogue permanent permette aux acteurs politiques de se parler, de confronter leurs idées, d’exprimer leurs désaccords et de laisser le peuple décider par un vote clair, sans entraves et sans contraintes. C’est là, à ses yeux, les fondamentaux de notre « unité » et de notre « paix sociale ».
Comme si cela ne suffisait pas, le lointain successeur d’Omar Bongo a choisi de tirer un trait sur une politique de son mentor : la géopolitique. Cette façon de gouverner qui veut qu’à certains postes, et nonobstant la compétence, soient nommées des personnalités issues de telle ou telle province ou ethnie.
Chacun se souvient que sous Omar Bongo, le poste de Premier ministre était réservé à l’Estuaire, que les postes de ministre de la Défense ou des Finances étaient la chasse gardée du Haut-Ogooué, etc. Brice Clotaire Oligui Nguema ne veut plus de cette forme de gouvernance du pays.
Compétence : savoir, savoir-faire, savoir-être
Il se veut le chantre de la compétence ! Ainsi, gare aux militaires et civils incapables. Ils ne sont plus sûrs de pouvoir garder leurs postes. Aussi, même si la compétence renvoie à « l’ensemble des connaissances, aptitudes et comportements qui permettent à une personne d’accomplir efficacement une tâche ou un ensemble de tâches dans un contexte professionnel », ses trois composantes, « savoir, savoir-faire, savoir-être », donnent-elles une indication claire de ce mot ?
Ce qui nous gouverne
Un nouveau chapitre s’ouvre désormais pour notre pays. L’ère de « l’homme qu’il faut à la place qu’il faut » a sonné. Appelé de tous leurs vœux, depuis la nuit des temps, par plusieurs Gabonais, le concept « ce qui nous gouverne, chère à Me Paulette Oyane Ondo, devrait devenir une réalité. » D’autant plus que « ce qui nous gouverne » – qui est au-dessus de nos têtes, sous nos pieds, dans l’air…- gouverne à la fois les gouvernés et les gouvernants : les normes. Ces lignes rouges à ne pas franchir, notamment le népotisme, le clientélisme, l’abus de pouvoir, les passe-droits, les règlements de comptes, les détournements des derniers publics…devraient céder définitivement la place à la bienveillance dans l’exercice de chaque fonction publique, la transparence dans la gestion du bien public, la promotion de l’éthique et de la déontologie en tout lieu et en toutes circonstances…
Ainsi, si les concours professionnels sont organisés avec rigueur et de manière impartiale, si l’attribution d’une bourse d’études répond à des critères objectifs applicables à tous, si la nomination à un poste met en compétition les plus méritants, si un ministre de la République ne limoge pas un compatriote – pour des raisons extraprofessionnelles – pour le jeter dans la précarité, si le président de la République appliquait toutes les normes de fonctionnement d’un Etat…. alors, on n’aura plus besoin de parler de « géopolitique » ; puisque les meilleurs seront au service de tout le monde, et chaque Gabonais trouvera son compte.
