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    Nouvelle Gabon Mining : la restructuration qui masque une crise profonde

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    Sous couvert d’une réorganisation stratégique, Nouvelle Gabon Mining (NGM) traverse une crise d’une ampleur rarement avouée. Loin du discours officiel évoquant des « difficultés structurelles », la restructuration annoncée le 3 décembre 2025 masque en réalité un management défaillant, une exploitation irrationnelle des gisements et des conflits sociaux récurrents. Ce sont in fine les travailleurs gabonais qui paient le prix de ces errements, avec un plan social majeur et des licenciements massifs à la clé.

    L’Administrateur Directeur général, Chandra Singh, a officiellement informé les délégués du personnel des motifs invoqués pour ce vaste chantier : lenteurs opérationnelles, désorganisation interne, baisse d’activité et impératif de réduction des coûts. La réorganisation prévoit la fusion ou la suppression de services, une refonte de l’organigramme et l’élimination de plusieurs postes.

    Pour atténuer l’impact social, la direction promet la mobilité interne, le non-remplacement des départs naturels et une rationalisation du fonctionnement. Mais derrière ce langage feutré, se profile un plan social de grande ampleur, soumis aux autorités du travail et lourd de conséquences humaines.

    Le plan de licenciement économique : un choc social majeur

    Un second document, strictement confidentiel, détaille un licenciement collectif pour motif économique, fondé sur les articles 63 et 74 du Code du Travail. NGM, active depuis 2013 dans l’extraction du manganèse, affirme subir de plein fouet la dégradation du marché mondial, la baisse de la qualité du minerai, des coûts logistiques exorbitants et les effets de mouvements sociaux ayant paralysé la production.

    La direction estime indispensable le licenciement de 37 employés, après une réduction préalable de 15 % des effectifs depuis juin 2025. Les indemnités proposées sont plus favorables que celles du Code du Travail : préavis d’au moins trois mois, allocations familiales maintenues six mois et un barème d’indemnisation revalorisé selon l’ancienneté. Malgré cette enveloppe, l’impact social reste considérable pour une entreprise qui emploie 259 personnes et dont les difficultés sont avant tout structurelles.

    Une gestion contestée et un management décrié

    Derrière l’argumentaire économique, les témoignages internes révèlent une crise de gouvernance. NGM souffre de l’emprise d’un groupe de dirigeants indiens, souvent absents du terrain ou jugés incompétents. Le véritable patron serait un frère cadet de Gagan, installé à Dubaï, qui ne se rend plus sur les sites. L’entreprise, décrite comme un « cadeau familial », se retrouve pilotée à distance, au détriment de la rigueur managériale.

    À Franceville, la direction a été confiée à un DGA, Gyslain Kelet, plus connu pour son activité pastorale que pour ses compétences administratives. Les choix techniques sont tout aussi contestables : le plateau de Beniomi, dont la durée de vie était estimée à vingt ans, a été exploité de manière irrationnelle. Au lieu d’appliquer les règles de blending (mélange de minerai riche et pauvre) pour optimiser la durée de vie, seuls les gisements les plus concentrés ont été prélevés, accélérant l’épuisement du site. L’administration des Mines, pourtant témoin de ces dérives, demeure silencieuse.

    NGM a également remplacé un cadre gabonais compétent en ressources humaines par un expatrié congolais aligné sur les décisions du groupe indien, accentuant le malaise social.

    Okondja : d’un modèle mondial à un exemple de dérive

    Le site d’Okondja, autrefois présenté comme un modèle international, est aujourd’hui décrit comme un symbole de médiocrité. Les Sud-Africains qui y assuraient la gestion ont été évincés au profit de responsables indiens jugés incompétents. Résultat : grèves incessantes, gestion précaire des CDD, absence d’évaluation du personnel et arrêt total de la production faute de maîtrise technique des unités – carrière, usine, transport.

    La route vers le quai de Lastourville est devenue un véritable « cimetière de camions » tant les accidents se multiplient, révélant un suivi HSE défaillant. Plus grave encore, la digue à stériles présente des fissures inquiétantes, faisant peser un risque majeur de pollution de la rivière Sébé. Là encore, l’administration minière et environnementale garde le silence.

    Un plan social qui épargne les vrais responsables

    Les licenciements visent des agents subalternes plutôt que les cadres indiens à l’origine de nombreux dysfonctionnements. Les techniciens chargés des convoyeurs, les contrôleurs de ponts bascules ou les ouvriers de la laverie sont les premiers visés, alors que les difficultés découlent d’erreurs de planification, d’une exploitation anarchique des gisements, d’une maintenance inexistante et d’un management approximatif.

    La direction prétend réaliser des économies alors que l’entreprise emploie plus de 1200 personnes au total : comment le départ d’une quarantaine d’employés faiblement rémunérés pourrait-il résoudre des pertes structurelles causées par une mauvaise gestion, une absence de vision minière et la défaillance des unités de production ?

    Une restructuration qui masque un déclin inquiétant

    Au regard des documents internes et des observations de terrain, la restructuration de Nouvelle Gabon Mining ressemble moins à un redressement qu’à un aveu d’échec. Les véritables causes de la crise – gouvernance familiale, décisions techniques hasardeuses, incompétence managériale, négligences environnementales – demeurent intactes. Les salariés gabonais, déjà épuisés par des conditions de travail dégradées, deviennent les victimes d’une stratégie qui ne s’attaque pas aux racines du mal.

    Dans un tel contexte, l’avenir de NGM apparaît sombre : entre gisements surexploités, production à l’arrêt et licenciements sélectifs, l’entreprise semble s’enfoncer dans une spirale de déclin dont les travailleurs pourraient être les premiers sacrifiés.

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