Les organisations Kamites du Gabon ont organisé, le 13 décembre au Musée national de Libreville, la première convention Kamite 6262 — ce nombre symbolique ferait référence à une période clé de l’histoire gabonaise et africaine selon les organisateurs. Cette rencontre visait à engager une réflexion sur la reconnexion du Gabon et de l’Afrique à leurs racines antiques, en plaçant l’héritage de l’Égypte ancienne, ou Kemet, au cœur des langues, des savoirs et des valeurs africaines.
Pour les organisateurs, cette démarche de réappropriation culturelle répond à une rupture historique. Selon eux, l’histoire africaine transmise par l’éducation moderne reste fragmentée, souvent limitée à la période coloniale ou postcoloniale, sans remonter aux civilisations fondatrices du continent. La convention entend ainsi restaurer une continuité historique afin de redonner aux Africains une conscience plus complète de leurs origines.
Réunis autour de cette ambition, les kamites ont présenté la convention comme un espace de transmission et de restauration des savoirs anciens. Pour le Pr. Savant Grégoire Biyogo, président d’honneur de la rencontre et figure reconnue du panafricanisme, l’enjeu dépasse le cadre culturel : « Le but étant que notre pays ait accès à la restauration des valeurs et s’appuie sur ces connaissances anciennes pour réussir son programme ».

Langue, histoire et identité au cœur des échanges
La question linguistique a occupé une place centrale dans les débats. Le Pr. savant Grégoire Biyogo a notamment soutenu que les langues africaines trouvent leur origine dans l’Égypte ancienne, défendant l’idée d’une continuité linguistique, philosophique et spirituelle à l’échelle du continent. Une démonstration qui a marqué les participants, à l’image d’Obame Essangui, r
« Nous avons compris que toutes les langues africaines tirent leur origine de là, et c’était vraiment extraordinaire », a affirmé Obame Essangui, représentant d’une association culturelle, marqué par la démonstration.
La convention a également permis de clarifier la notion de Kamite, issue du courant panafricain. Les intervenants ont expliqué que Kamites et traditionalistes poursuivent le même objectif de restauration des cultures ancestrales, la différence résidant dans la profondeur historique revendiquée. Les débats ont ainsi posé une question centrale : un peuple peut-il se construire durablement sans embrasser l’ensemble de son histoire ?

Privat Ngomo, conférencier et militant Kamite, a proposé une définition engagée du terme. Dans son intervention, il a estimé que l’Africain moderne reste marqué par les traumatismes historiques et a déclaré qu’« un Kamite, c’est un Noir qui a décidé de ne plus être africain » (au sens de l’identité post-coloniale). Selon lui, redevenir Kamite revient à retrouver la conscience d’être à l’origine des premières civilisations humaines. « Cette civilisation est née sur la terre de Kama », a-t-il rappelé, soulignant que le terme Kamite désigne l’« homme de la terre noire ».
Au terme de la convention, les organisateurs ont annoncé plusieurs projets : la création d’un institut d’enseignement de l’Égypte ancienne, le développement de disciplines comme la médecine sacrée, ainsi qu’une plateforme destinée à relier les Kamites du Gabon à ceux d’Afrique et de la diaspora. En lançant Kamite 6262, les traditionalistes gabonais ouvrent ainsi un débat de fond sur la mémoire, l’identité et la place de l’histoire ancienne dans les dynamiques contemporaines de développement national.


