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    Entretien : Melba Orlie Nzang Meyo, l’experte qui replace le Gabon sur la carte de l’IA

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    « Je vois le Gabon briller numériquement »

    C’est loin de sa terre natale, au Sénégal, que Melba Orlie Nzang Meyo a conçu Obone IA, son projet phare pour la souveraineté numérique. Ce travail colossal lui a valu d’entrer au panthéon de l’intelligence artificielle africaine en étant gravée dans le Livre Blanc du SALTIS (Salon des algorithmes, des technologies et de l’innovation du Sénégal) 2025. Forte de cette reconnaissance, et répondant à l’appel de la Première Dame, l’entrepreneure continue de diriger le Comité scientifique gabonais de recherche sur l’IA. Elle nous livre une interview essentielle sur sa vision pour arracher le Gabon et l’Afrique centrale à l’invisibilité numérique.

    Gabonclic.Info : Après une décennie d’entrepreneuriat à succès, notamment avec votre marque « La Cocotte Médi » au Sénégal, vous lancez aujourd’hui des projets pour le Gabon. Quel a été le déclic de cet engagement national ?

    Melba Orlie Nzang Meyo : Mon engagement envers le Gabon, après mon départ en 2016 motivé par le cyber harcèlement, est le résultat d’une prise de conscience. J’avais coupé les ponts avec mon pays jusqu’à ce que la Première Dame m’interpelle en 2024. Elle m’a dit que le Gabon avait besoin de moi. Cette intervention a remis les choses en perspective, d’autant plus que j’ai constaté le manque de visibilité des initiatives Tech gabonaises. C’est donc l’appel d’une haute autorité, combiné à la volonté d’occuper l’espace numérique gabonais, qui a rendu ce retour possible.

    Melba Orlie Ndong Nzang Meyo
    L’expertise au service du pays : Melba Orlie Nzang Meyo prône le réinvestissement dans la recherche numérique pour arracher le Gabon à « l’invisibilité numérique »

    Vous avez co-fondé l’IA sénégalaise Awa, et vous lancez désormais Obone IA au Gabon. Quelle est la particularité d’Obone IA ?

    Obone IA est la première intelligence artificielle capable de comprendre et de répondre en langue fang, une des langues gabonaises. Ce projet est une réponse directe à une frustration : celle de voir le continent africain, bien que très peuplé, quasiment inexistant dans les données numériques globales. Obone IA vise à être un outil de préservation culturelle en numérisant nos cinquante langues pour qu’elles ne disparaissent pas, tout en étant un moteur de réduction de la fracture numérique pour nos citoyens, y compris ceux qui ne maîtrisent pas les langues coloniales.

    Quel est le rôle principal du Comité scientifique gabonais de recherche sur l’IA que vous présidez ?

    Notre rôle est de structurer et de contextualiser l’innovation. Nous travaillons sur quatre axes alignés sur le Programme national de croissance et de développement (PNCD). Nous attaquons notamment la promotion de l’employabilité en créant des opportunités Tech et la mise en place d’infrastructures modernes en proposant des solutions numériques adaptées aux besoins locaux. Fondamentalement, nous gérons la validation scientifique des données linguistiques et contextuelles, car nous ne pouvons pas entraîner une IA avec des sources qui se contredisent. La recherche n’est pas une perte de temps, elle est la clé de la crédibilité.

    Figurer dans le Livre Blanc du SALTIS est une consécration. Quel message cette reconnaissance envoie-t-elle au Gabon et à l’Afrique centrale ?

    C’est la preuve que le Gabon a un apport scientifique à faire valoir sur le continent. Le message est un appel urgent à l’action : l’Afrique centrale doit impérativement réinvestir dans la recherche numérique. Nos réalités sont différentes de celles de l’Afrique de l’Ouest (par exemple, notre éco-numérique n’est pas le même en raison de notre forêt). Nous devons cesser d’importer des solutions non contextualisées et commencer à valoriser ce qui est fait localement pour nous imposer à l’extérieur. Cette reconnaissance nous ouvre une porte pour affirmer que nous avons notre place.

    Quel message lancez-vous à la jeunesse africaine, notamment aux femmes, et quel est votre mot de la fin ?

    À la jeunesse africaine, je dis : levez-vous, soyez moins paresseux et plus audacieux. Pour les jeunes femmes en particulier, nous devons être plus présentes. Si nous continuons de nous cacher, nous ne serons jamais prises en compte. Il faut commencer par croire en soi avant d’attendre que la société nous valide. L’enjeu de l’IA pour le continent est la Souveraineté.

    Pour conclure, je dirais que nous devons continuer de croire que l’Afrique peut aller quelque part et surtout qu’elle peut être souveraine. En mettant l’accent sur mon pays, je vois un Gabon occuper de très belles places en termes de recherche scientifique et de nouvelles technologies. Je vois le Gabon arriver en grande pompe dans des salons où on ne nous attendait pas. Je vois le Gabon briller, numériquement parlant et culturellement.

    Propos recueillis par Sophie Edjogo

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